Cette recherche interroge Pollens, le roman de Mahi Binebine, comme l’une des rares représentations des effets de l’ivresse cannabique dans la littérature maghrébine. L’esprit rationnel s’y oppose à la folie du cannabis qui envahit les esprits. Mais au-delà de cet aspect, il s’agit surtout de dénoncer une déroute, la dégénérescence de la quête de l’utopie bucolique en une descente infernale. Digne des meilleures histoires d’amour, Pollens est aussi une réflexion sur le pouvoir despotique qui n’hésite pas à recourir à des méthodes très archaïques pour dominer la population et briser les espoirs. Les protagonistes mènent une lutte contre la laideur et la monstrusoité incarnées par le hideux seigneur de Kétama pour défendre les valeurs humaines de l’amour, de l’amitié et de l’intégrité morale. Dans ce combat, le récit et l’écriture, comme dans la plupart des romans de Binebine, sont les meilleures armes pour se défendre contre l’amnésie et le silence complice.